Première édition - 10 février 2001, Docks des Suds
Le travail de mémoire
Parler de crimes de masse et de génocides n’est certainement pas anodin, alors que se termine un 20e siècle marqué par les catastrophes humaines, humanitaires et culturelles. En ce début de 21e siècle, siècle de tous les espoirs d’un monde meilleur, le climat est agité en France, marqué par les débats parlementaires qui aboutiront à la reconnaissance du Génocide des Arméniens, premier génocide du 20e siècle, le 29 janvier 2001 par le Parlement, en France. Dans ce contexte, la Jeunesse Arménienne de France, particulièrement investie dans ce combat pour la cause arménienne, décide de prendre ses responsabilités et d’ouvrir la voie à toutes les victimes de ces crimes, comme un rappel à l’histoire, afin que toutes et tous s’engagent, et disent ensemble “Plus jamais ça!”.
Le 10 février 2001, Amnésie internationale est née.
L’évènement se veut résolument citoyen, engagé, culturel, politique et philosophique
Les premiers jalons sont alors posés : l’ambition de la manifestation est de soutenir les peuples victimes de génocides au cours du XXe siècle et de sensibiliser la population française à ces crimes passés, pour que l’histoire ne se répète pas. L’accent est d’abord mis sur le Génocide des Arméniens, premier dans le temps, mais avec la forte volonté d’y associser les Juifs, les Cambodgiens, les Tutsis du Rwanda, pour qu’ensemble soit accompli le “devoir de mémoire”, pierre angulaire de la reconnaissance, de la justice, et de la prévention de nouveaux crimes.
Aux Docks des Sud de Marseille, les éléments qui feront la marque de fabrique d’Amnésie internationale tout au long de son existence sont alors posés. L’évènement se veut résolument citoyen, engagé, culturel, politique et philosophique. Les concerts de soutien associant des plateaux d’artistes internationaux et régionaux, côtoient les débats et les tables-rondes où échanges spécialistes de renom, journalistes, ou philosophes. On y trouve également un village de la mémoire, avec des espaces dédiés aux communautés et aux associations, des espaces culturels et artistiques, avec des sélections d’ouvrages et des expositions et des espaces de détente et de sociabilités.
À cette occasion, la Charte d'Amnésie internationale, rédigée par Yves Ternon, lue et signée par les intervenants, est dévoilée
Les soutiens moraux de ce projet d’envergure sont nombreux :
Ariane Ascaride (Comédienne), Pierre Arditi (Comédien), Serge Avédikian (Comédien, réalisateur), Charles Aznavour (Auteur, compositeur, interprète), Marie–Christine Barrault (Comédienne), Roland Blum (Député des Bouches-du-Rhône et maire des 11e et 12e arrondissements de Marseille), Richard Bohringer (Comédien), Romane Bohringer (Comédienne), Patrick Bosso (Humoriste), Bratsch (Auteurs, Compositeurs, Interprètes), Jean-Paul Bret (Maire de Villeurbanne), Robert Bret (Sénateur des Bouches-du-Rhône, Conseiller Municipal de Marseille), Catherine Coquio (Sociologue, Maître de conférence en littérature comparée à l’université de Poitiers, Présidente de l’Aircrige), Elie Chouraqui (Cinéaste), Bernard Deflesselles (Député des Bouches-du-Rhône, Conseiller Régional, Conseiller Municipal d’Aubagne), Manu Di Bango (Auteur, Compositeur, Interprète), Maurice Di Nocera (Conseiller général des Bouches-du-Rhône), Atom Egoyan (Cinéaste), Alain Finkielkraut (Philosophe), Jean-Claude Gaudin (Sénateur Maire de Marseille, Vice-président du Sénat), Gérard Gelas (Ecrivain, Metteur en scène, Directeur du théâtre du Chêne noir- Avignon), Jean-Noël Guérini (Sénateur, Président du Conseil Général des Bouches-du-Rhône), Robert Guédiguian (Cinéaste), Guy Hermier (Ancien député des Bouches-du-Rhône, Maire des 15e et 16e arrondissements de Marseille), Hovid (Dessinateur, caricaturiste), Marie-Christine Hubert (Docteure en Histoire, Membre du Centre de Recherche Tzigane), I Muvrini (Auteurs, compositeurs, interprètes), Henri Jibrayel (Conseiller général des Bouches-du-Rhône), Kegham Kevonian (Président mondial des organisations « Terre et Culture »), Gilles Manceron (Historien, Rédacteur en chef de la revue « Hommes et Libertés » de la Ligue des Droits de l’Homme), Michel Marian (Professeur à l’Institut d’Etudes Politiques de Paris, Membre de la rédaction de la revue “Esprit”), Richard Martin (Comédien, Directeur du Théâtre Toursky- Marseille), Christophe Masse (Député des Bouches-du-Rhône, Vice-président du Conseil Général des Bouches-du-Rhône, Conseiller municipal), Marius Masse (Conseiller général des Bouches-du-Rhône), Jean-François Mattei (Ministre de la Santé, de la famille et des personnes handicapées, Conseiller municipal (Marseille), Conseiller régional PACA), Maurane (Auteur, compositeur, interprète), Roger Mei (Maire de Gardanne), Patrick Menucci (Vice-président du Conseil régional PACA, Conseiller municipal de Marseille), Gérard Miller (Psychanalyste, Journaliste), Edgar Morin (Sociologue, Directeur de recherches au CETSAH), Ariane Mnouchkine (Directrice du théâtre du Soleil – Paris), Madeleine Mukamabano (Journaliste à RFI, Productrice à France Culture), Renaud Muselier (Député des Bouches-du-Rhône, Premier adjoint au maire de Marseille), Michel Piccoli (Comédien), Marie-Claude Pietragalla (Directrice Générale du Ballet National de Marseille), André Santini (Député des Hauts-de-Seine, Maire d’Issy-les-Moulineaux), Sebastião Salgado (Reporter, photographe), Bernard Souroque (Directeur Artistique), Yves Ternon (Chirurgien, Historien), Guy Teissier (Député des Bouches-du-Rhône, Maire du 9e arrondissement de Marseille), Henri Troyat (Ecrivain – Membre de l’Académie Française), Michel Tubiana (Président de la Ligue des Droits de l’Homme), Michel Vauzelle (Président du Conseil Régional PACA), Henri Verneuil (Cinéaste), Michel Wieviorka (Sociologue, Directeur du CADIS et de l’EHESS -CNRS), Clément Yana (Président du CRIF- Marseille), Karl Zéro (Journaliste)
3500 personnes se sont donné rendez-vous aux Docks des Suds pour dire “Plus Jamais” et écouter les sons d’I Muvrini, de Bratsch ou de Manu Di Bango, dans cette édition parrainée par Romane Bohringer
Le 10 février 2001, la première édition d’Amnésie Internationale est résolument “World Music”.
Deuxième édition - 13 mars 2004, Docks des Suds
La résistance face au négationnisme
Le succès d’Amnésie Internationale et le sujet, inépuisable, appelait à une deuxième édition. Le 14 mars 2004, 3 ans plus tard, Amnésie Internationale reprend place aux Docks des Sud, dans le format qui a fait son succès, et s’imposant comme un événement culturel incontournable dans la cité phocéenne.
un plateau version chanson française avec, en tête d'affiche, Juliette Gréco et Art Mengo. Ariane Ascaride et Robert Guédiguian
Cette fois-ci, le cadre est posé.
Une table-ronde, animée par Vincent Hugeux, grand reporter à l’Express, s’interrogeait sur les Résistances face au négationnisme. Autour de la table, Catherine Coquio (Maître de conférence en littérature comparée à l’université de Poitiers, présidente de l’Aircrige), Yves Ternon (chirurgien, docteur en histoire), Sophie Ferhadjian (professeur agrégée d’histoire), Yann Jucovics (ancien juriste à la chambre d’appel des tribunaux pénaux internationaux pour le Rwanda et pour l’ex-Yougoslavie, maître de conférence en droit à Amiens),et Hiner Saleem (cinéaste kurde-irakien, primé au festival de Venise 2000) ont ainsi abordé les différents visages du négationnisme et les actions de « résistance » (politique, culturelle, juridique et citoyenne) mises en œuvre pour lutter contre la réécriture de l’Histoire. Dans la salle, toujours autant de monde rassemblé pour ce concert-événement, mais, sur scène, un plateau version chanson française avec, en tête d’affiche, Juliette Gréco et Art Mengo. Ariane Ascaride et Robert Guédiguian furent cette fois les parrains de cette édition.
Juliette Gréco
Tête d'affiche du concert de soutien de la 2e édition d’Amnesie Internationale, consacrée à la lutte contre les génocides et le négationnisme
Troisième édition - 11 mars 2006, Docks des Suds
La responsabilité des états
La troisième édition d’Amnésie internationale prit place le 11 mars 2006, dans son espace de prédilection. Cette fois-ci, l’accent est mis sur la responsabilité des États, qu’elle soit active lorsque le gouvernement participe ou organise le génocide, passive lorsque la reconnaissance de cette responsabilité se fait attendre ou est niée ou encore complice par le jeux des coalitions des ententes et des alliances.
Table ronde éclectique, plateau musical ambitieux et création du village de la mémoire marquent cette édition 2006
Amnésie Internationale persiste et se renouvelle
La table ronde, animée par Ara Toranian, laisse ainsi s’exprimer les points de vue de Catherine Coquio (Maître de conférence en littérature comparée à l’université de Poitiers, présidente de l’Aircrige), d’Yves Ternon (Chirurgien, docteur en histoire), Raymond Kevorkian (Historien, conservateur de la bibliothèque Nubar à Paris), Laura Coret (Doctorante et enseignante à l’Université Paris 8 à Saint-Denis), Marcel Kabanda (Historien, consultant en sciences humaines et sociales à l’Unesco), Alain Chouraqui (Directeur de recherche au CNRS et président du comité de pilotage du projet «mémoire du camp des Milles») et Rafaëlle Maison (Professeur de droit à la faculté de Picardie).
À cette occasion, la Jeunesse Arménienne de France souhaite valoriser ce projet sur le plan scientifique : un recueil est édité sur cette même thématique de la Responsabilité des Etats. Réalisé en partenariat avec l’Aircrige, cet ouvrage réunit des contributions de neuf intellectuels et universitaires qui ont participé aux débats des deux premières éditions, et d’autres qui se sont joints pour soutenir cette nouvelle initiative. Sans être exhaustif, ce livre avait pour ambition d’être un outil pédagogique d’information et de réflexion sur la question des génocides.
Pour l’édition 2006, c’est une palette de sons très large qui envahit la grande scène: le hip hop chaloupé des Saïan Supa Crew côtoie les rythmes Mandingue de Mory Kanté. Les Wriggles, No One Is Innoncent complètent le tableau de ce dernier cru, parrainé de nouveau par Ariane Ascaride, accompagnée cette fois-ci de Jean-Pierre Darroussin.
Le Génocide des Tutsis ( Mémorial de la Shoah) ; Mémoire et vigilance (Passeurs de mémoires en collaboration avec Le Sursaut), Le Génocide perpétré par les Khmers Rougaes ( Art et Urgence). Les arts plastiques sont également à l’honneur, avec
Les cartes postales anatoliennes de L’Arménie martyrs (Jacques Sarafian et Robert Takankedjian, de l’association «Terres d’Arménie») et en regard, les illustrations Regards sur la Cause arménienne, de Jacques Lardie.
Au Village de la mémoire, les spectateurs peuvent apprécier et s’éveiller au rythme des différentes expositions présentées
Quatrième édition - 22 mars 2008, Docks des Suds
La mobilisation citoyenne
Placée sous la présidence de Robert Guédiguian, la 4e édition d’Amnésie Internationale s’interroge sur les mobilisations citoyennes face aux génocides et au négationnisme. Levier indispensable pour combattre l’amnésie collective, résister au négationnisme et prévenir la répétition des actes barbares.
Pour contribuer à cette mobilisation, Amnésie Internationale suscite une réflexion approfondie sur les phénomènes génocidaires, provoque l’expression collective de citoyens en prenant à nouveau appui sur l’engagement d’intellectuels, d’artistes, de représentants de la société civile et de personnalités politiques.
Quels espoirs attendre de la mobilisation citoyenne ? Comment mobiliser ? Quelle place a lamobilisation dans l'arsenal des moyens de lutte ? Comment réduire le sentiment d'impuissance ?
Sur le thème « Génocides et négationnismes : la mobilisation citoyenne », la JAF avait invité cette année quatre personnalités de notoriété publique : Jacky Mamou, président du collectif Urgence Darfour ; Jean-Michel Quillardet, grand maître du Grand Orient de France ; Yves Ternon, le patriarche de l’historiographie des génocides, et enfin Bernard-Henri Lévy, venu tout exprès d’Amérique du Sud à Marseille, pour marquer sa solidarité avec ceux qui combattent le négationnisme, particulièrement celui qui frappe le génocide arménien.
Fait rare chez le philosophe, c’est à la fois au nom des principes universels qui animent son combat et au nom de sa judéité qu’il s’est prononcé. « Pour moi, insista-t-il, qui ai passé ma vie à lutter contre le négationnisme de la Shoah, c’est une question de principe et d’honneur d’être aux côtés des Arméniens… La tentative d’extermination des juifs a sans doute atteint une sorte de sommet dans l’horreur.
Mais le négationnisme est aussi odieux dans tous les cas. Il faut une solidarité des mémoires. » Les intervenants ont été unanimes. Loin de se limiter à la seule question arménienne, leurs arguments ont inscrit le génocide arménien à
son niveau naturel : 1915 a fourni le modèle à tous les génocides qui ont suivi. Il est plus que l’inauguration de l’horreur d’État, il en est tout simplement le modèle exemplaire de la Shoah, du génocide rwandais et aujourd’hui encore celui du Darfour.
Le millier et plus de personnes qui s’était déplacées ont clos les discours par une standing ovation. En clôture, Robert Guédiguian, cinéaste et président d’honneur d’Amnésie 4, a apporté la touche de l’artiste. Le tout en partenariat avec Les Nouvelles d’Arménie Magazine (Ara Toranian animant les débats), Radio France Internationale, La Provence, La Marseillaise et d’autres médias locaux.